Forécariah : Ashapura reprend la mine de fer de Yomboyéli

L’indienne Ashapura a repris les actifs de l’ancienne société Forécariah Guinée Maning (FGM) qui exploitait le minerai de fer de Yomboyeli, situé dans la sous-préfecture de Moussaya, préfecture de Forécariah après plus de 4 années d’arrêt.

 L’annonce a été faite le 5 juin 2019, par le gouvernement guinéen avec une reprise des activités vers le mois d’octobre prochain. Déjà, à la base vie à Yomboyeli et au  port de Konta les activités de rénovation sont sur la voie, a constaté AMINES sur place.

Le ministère guinéen des Mines et de la Géologie et la société minière indienne Ashapura ont signé le 5 juin trois accords portant entre autres sur la reprise de l’exploitation de la mine de fer de Yomboyeli. Le nouvel acquéreur devra désintéresser à hauteur de 25 millions de dollars les créanciers de Forécariah Guinea Mining, tombé en faillite.

La mine de fer de Yomboyéli et ses trois millions de tonnes de réserves est certes petite. Mais, sa relance va néanmoins atténuer le déséquilibre entre les différentes filières minières du pays et redonner espoir aux anciens travailleurs de Forécariah Mining, tombée en faillite en 2015. Ce, juste trois ans après son installation à Forécariah, près de la frontière guinéo-sierra léonaise.

Comment en sommes-nous arrivés-là ?

Pour la petite histoire, c’est en 2009, sous le régime du Conseil national pour la démocratie et le développement (CNDD) que l’Etat guinéen avait signé un contrat  avec China international Fund (CIF) qui est un fond d’investissement chinois, basé à Singapour (Hongkong).  China international Fund avait obtenu un pacte d’actionnaire avec la Guinée qui visait des investissements aux alentours de  25 à 30 milliards de dollars. 

Le CIF, une société basée à Hongkong, apportera l’immense majorité des capitaux, la Sonangol n’intervenant que pour la partie pétrolière. De son côté, le gouvernement guinéen devrait créer la Société ­nationale minière de Guinée, dans laquelle tous les actifs miniers de l’État devaient être  transférés. Une joint-venture entre les deux groupes avait été créée ensuite qui a donné naissance à Forécariah Guinea Mining (FGM). Dans les accords, china international fund (CIF) devait construire des infrastructures routières, ferroviaires, des ports, des hôpitaux  qui seront remboursés en minerais par l’Etat guinéen.

On se rappelle encore du scandale de corruption incriminant Mahmoud Thiam, ministre des mines et de l’énergie de l’ère du CNDD. Il a été condamné par la justice américaine pour ‘’blanchiment d’argent et de corruption’’ sur le fait qu’il aurait reçu  8, 5 millions de dollars de pots de vin en vue de faciliter l’obtention de contrats miniers en faveur de la China International Fund pendant cette période (2009). La justice américaine a vite fait le lien entre l’achat par Mahmoud Thiam d’un appartement à New-York via une banque hongkongaise et la proximité avec la China Fund International avec qui, l’ancien ministre a traité à l’époque.

Pourtant, CIF n’a pas pu concrétiser toutes ses promesses en matière d’investissements en Guinée. Mais elle avait quand même réussi à rafler 45 permis dans les secteurs minier, agricole, transport, énergie, etc. à travers le pays. C’est ainsi que la société Forécariah Guinea Mining qui est une joint-venture de CIF et Bell zone a été plus tard rachetée par China international Fund. Pour un investissement total de 300 millions de dollars, la mine devrait produire 4 millions de tonnes de minerai de fer par an. La Guinée détenait 15% de la co-entreprise et les deux autres actionnaires se partageaient le solde à parité, soit 42,5%. Le port devait être construit par la joint-venture Guinea Development Corporation.

FGM s’est alors installée dans la localité en 2013, dans un contexte purement spécifique. Elle n’a pas respecté toutes les lois et règlementations relatives à l’exploitation minière en Guinée, notamment les études d’impacts environnemental et social assorti d’un plan de gestion environnemental et social, la convention de développement local entre autres avant de démarrer l’exploitation. La première cargaison a été exportée à la fin du mois de juin 2013.

Après un peu plus de 2 ans d’exploitation, Forécariah Guinea Mining est partie comme elle est venue laissant derrière elle plusieurs dettes, des employés et des communautés dans un désespoir total.

Les dessous d’une reprise !

Une procédure de redressement judiciaire a été enclenchée avec l’accompagnement du ministère des mines et de la géologie à la demande des créanciers, suite à la fermeture de Forécariah mining. Un syndic liquidateur a été désigné. Il a été question de liquider les actifs pour désintéresser les créanciers et la relance des activités a été privilégiée. Le syndic s’est investi dans le sens de trouver un repreneur à même de supporter les passifs qui se chiffrent à 25 millions de dollars. C’est ainsi que l’indienne Ashapura s’est engagée dans un premier accord signé avec le syndic liquidateur de supporter les passifs.

Un engagement financier certes important pour la firme indienne, mais qui, au vu de la configuration spécifique de la mine de Yomboyéli, semble parfaitement justifié : le site outre ses 3 millions de tonnes de réserves de fer estimées est proche de la côte, ce qui permettra d’évacuer les minerais à moindre coût. Un avantage que n’ont pas d’autres mines, notamment les blocs de Simandou nord et sud, le Mont Nimba entre autres dans le sud du pays.

Le deuxième accord, conclu avec le ministère guinéen des Mines, porte sur la réattribution du titre minier de Forécariah Mining.

Et le troisième accord concerne la rétrocession des installations portuaires à l’État. Cette rétrocession des installations portuaires de Forécariah Mining, qui redeviennent la propriété de l’État à travers l’Agence nationale d’aménagement des infrastructures minières (ANAIM).

 Cette disposition doit permettre d’avoir un port multi-usage de l’infrastructure, à l’instar du chemin de fer de 135 km reliant le plateau bauxitique de Sangarédi au port minéralier de Kamsar, selon le secrétaire général du ministère des mines et de la géologie, Sadou Nimagan.

 Pour lui, le franco-allemand Monaco Resources était en négociations avancées pour assurer la gestion technique du port de Konta. « Nous voulons créer dans cette région un corridor d’activités diverses : il y aura un terminal minier, un fruitier, un autre pétrolier et de marchandises en vrac », détaille le secrétaire général du ministère des Mines, qui espère désengorger le Port de Conakry par le transfert du terminal et du dépôt pétrolier du centre administratif de Kaloum à Forécariah.

Mais avant de tirer parti de ces dispositions favorables, Ashapura devra d’abord se plier à un calendrier court. Selon les termes de l’accord conclu, la firme indienne, qui table sur la création de 3 000 emplois directs, disposera de 4 mois seulement pour réhabiliter le port et débuter l’exploitation. « Ce projet est important pour le pays parce quil permet non seulement la relance des activités de la mine de Forécariah, mais aussi louverture de nouvelles opportunités sur un nouveau corridor, à travers la réhabilitation du port de Konta », indique le ministre des Mines, Abdoulaye Magassouba.

Pour l’instant, l’annonce du redémarrage des activités d’exploitation du minerai de fer de Yomboyéli crée un ouf de soulagement auprès de toutes les parties prenantes (communautés riveraines, autorités à tous les niveaux et l’entreprise). Pour vue que les lois du pays soient respectées et que les revenus tirés de l’exploitation puissent être profitable à tous. 

Mamadou Oury Bah

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