Orpaillage à Siguiri : Quels impacts sur la gente féminine ?

L’orpaillage, une activité quoique difficile, est pratiquée par de nombreuses femmes. Des guinéennes se lancent dans cette pratique malgré les risques majeurs auxquels elles s’exposent.

Bôh KONATE est orpailleuse depuis 7 ans. Elle a abandonné son activité de commerce pour être à la mine de Falikô, à environ 7 km de la sous-préfecture de Doko, préfecture de Siguiri. Son mari aussi a abandonné son atelier de menuiserie pour la quête de l’or. « Les gens nous ont dit, une fois à Siguiri, nous pouvons même balayer la terre et avoir de l’or. C’est ainsi que nous nous sommes précipités pour venir et laisser toutes nos activités là-bas», voici l’idée maitresse ayant poussé Bôh Konaté et son mari à tout abandonner pour la recherche du minerai rare.

L’histoire de ce couple est différente de celle de M’Mah Saran Camara. Cette dernière a abandonné son petit commerce pour manque de rendement au profit de l’orpaillage, il y a 3 mois. « Je suis venue ici parce que ça va pas du tout au marché. On ne gagne presque rien. Et si ça ne va pas au marché, ce qui veut dire que les mines ne donnent pas bien », explique la dame ayant un enfant au dos.

Avantages

Il n’est pas fréquent de voir une femme ayant une réussite dans l’orpaillage. Mme Bôh, dit quand même avoir réussi à trouver le trésor une fois. «Notre première année ici, j’ai eu trente millions (30 000 000 GNF) que j’ai donné à mon mari. Ça a servi à construire une maison et appuyer certains parents au village. Mais à ce jour c’est difficile, nous ne gagnons presque rien parce que les mines ne donnent plus comme avant », explique-t-elle.

M’Mah Saran Camara, quant à elle, se sent fière. Elle assure: «depuis que je suis venue dans les mines ici, je peux dire Dieu merci. Parce que j’arrive à me nourrir et subvenir à mes besoins primaires puis prendre soins de mon enfant ». Sa crainte est le fait de voir à tout moment des gens mourir dans les trous.

Malgré ses préoccupations à la mine, Mme Camara s’occupe bien de son mari (conducteur de moto taxi, ndlr) et de son enfant. Elle laisse entendre tout de même qu’elle cherche un moyen de quitter la mine pour s’occuper de son foyer. « Si je gagne une somme importante aujourd’hui, j’irais recommencer mon petit commerce. C’est tout ce que je souhaite actuellement. Ce, pour enlever mon bébé sous ce soleil ardent », raconte-t-elle.

Conséquences

Les femmes participent activement à l’orpaillage. Elles dépassent parfois les hommes, mais l’impact est négatif. Les orpailleuses abandonnent leurs foyers pour aller dans les mines. « Elles s’y font des enfants avec des nouveaux maris ou copains. A leur retour au village, leurs maris légitimes leur demandent de choisir entre renvoyer ces enfants ou quitter le foyer. Et ça finit souvent par le divorce », laisse entendre Mme Aissatou Doumbouya, directrice préfectorale des affaires sociales, de la promotion féminine et de l’enfance de Siguiri.

D’autres femmes, affirme Mme Doumbouya, font involontairement des enfants dans les mines et ont honte ou peur de revenir avec les enfants chez leurs parents. « Dans la plupart des cas, elles jettent les enfants. C’est ce qui fait qu’on entend souvent des cas d’abandons d’enfants à Siguiri. Sinon aucune femme de Siguiri ville n’abandonne son enfant ».

Quant à la stigmatisation dont les orpailleuses sont victimes, elle laisse entendre que les femmes règlent ces problèmes à l’amiable. « Parce qu’elles ont peur de la justice et si elles se mettent à notre disposition et qu’il n’y ait pas d’accord, nous les envoyons à la justice », fait-elle savoir.

Pour trouver solutions à cette situation, la Directrice déclare : « nous sensibilisons les femmes sur le phénomène d’abandon des foyers. Nous les faisons comprendre que les activités de saponification, de teinture, de coiffure ou de couture sont mieux que l’orpaillage pour les femmes ».

Quant à Fatoumata Binta Sow, en classe de 10ème Année au collège de Doko, elle  demande aux filles et femmes qui abandonnent les salles de classe au profit de l’orpaillage de revenir à l’école. Parce que pour elle, les hommes d’aujourd’hui peuvent donner de l’argent aux filles, juste pour les posséder. « Et après, ils les abandonnent. Et elles ont honte de revenir à l’école. Ces hommes des mines qui viennent de partout peuvent gâcher l’avenir d’une fille très rapidement », conseille-t-elle.

Au regard de cette situation, les femmes désireuses de travailler dans les mines artisanales d’or doivent savoir que leur eldorado ne s’y trouve pas.

Mamadou Oury BAH