La problématique de la bonne gouvernance se pose avec acuité en Guinée. Des défaillances sont constatées à tous les niveaux, de la base au sommet. Ce mode de gouvernance caractérisée par l’inefficacité et la dilapidation des ressources cause d’énormes soucis aux populations censées être les bénéficiaires des œuvres accomplies dans le cadre du développement. La gestion des fonds issus de la taxe sur le chiffre d’affaire versés par la société minière de Dinguiraye fait des grincements de dents au niveau de la société civile.
Absence de conseil préfectoral de développement (CPD)
A ce jour, Dinguiraye est l’une des rares localités minières à ne pas avoir un CPD légal et fonctionnel. Ceci dénote d’un manque de volonté des autorités locales quant à la bonne orientation des fonds dont bénéficient les communautés sur le plan des redevances versées par la SMD.
Plusieurs tentatives ont échouées par le fait du manque de volonté des autorités tant au niveau préfectoral que ministériel. En 2016, une mission venue de Conakry s’est rendue à Dinguiraye dans le but d’installer le CPD. Mais pour des raisons non justifiées, elle a rebroussée chemin sans remplir sa mission. A l’origine, une vive tension était en l’air. Tension née de l’affichage à la veille d’une liste nominative des personnes choisies unilatéralement par la préfecture sans consultation préalable des parties prenantes dont les structures devaient à l’interne choisir leurs représentants. Ceci a fait un levé de bouclier contre l’initiative notamment au sein de la société civile locale et au niveau d’une aile dissidente conduite par le Directeur préfectoral des mines Mamadou Alpha Condé, qui était à couteaux tirés avec le préfet d’alors Mouloukou Souleymane, remplacé par le Colonel Mamadou Lamarana Diallo.
La mise place du CPD ayant échouée, la gestion des affaires est restée à un comité dénommé cellule de gestion administrative installé par le préfet.
(decisions N0 1 et 2)
Cette structure est loin de faire l’unanimité au sein de l’opinion préfectorale. Certains acteurs de la société civile pensent que cette cellule est à la solde des préfets qui se succèdent. « Ce comité est pilotée par une poignée de cadres, notamment le Directeur Préfectoral du plan et celui des micros réalisations. Ils sont sous la coupe du préfet de qui, ils reçoivent des ordres » soutient un acteur de la société civile rencontrée.
Des marchés distribués à des fidèles ?
Les réalisations des communautés sont effectuées sur la base des projets inscrits sur leurs plans de développement (PDL). La spécificité est que les montants ne sont pas versés directement aux collectivités par la SMD. Le financement des actions est effectué par la société à travers une transaction avec l’entreprise contractante chargée d’exécuter les travaux.
La gestion des marchés est une affaire de sous qui se partagent entre amis et fidèles de l’autorité préfectorale de Dinguiraye. Des marchés attribués à des entreprises le plus souvent locales dont la capacité technique et financière fait défaut. C’est pourquoi certaines réalisations effectuées ne répondent à aucune norme en la matière. Selon des informations que nous avons reçues, 105 entreprises et PME sont enregistrées à Dinguiraye. Après un travail d’épuration récemment effectué, 75 entreprises sont désormais retenues, jugées aptes à postuler pour les marchés selon la cellule. M. Diakité de la société civile lui parle de partage de marchés entre alliés « A Dinguiraye, tout le monde profite, des entreprises et PME sont créés de manière opportuniste par la plus part des cadres de la préfecture ainsi que certains acteurs de la société Civile ».
Une autre source nous a indiqué la mise en vente des cahiers de charges en prélude à l’attribution au lancement des futures réalisations. La même source parle déjà de l’achat par beaucoup d’entreprises des cahiers de charges à un montant de 1000 000 FG. la source renchérit « je suis sûr que l’achat de ces cahiers de charges par des entreprises est synonyme de l’obtention de facto d’un marché ».
Que fait la société civile locale ?
Les organisations de la société civile locale déplorent le retard pris dans la mise en place du conseil préfectoral de développement (CPD). Cependant elle manque d’actions concertées. Ceci est favorisé par le fait que certains acteurs de la société civile font double jeux et participent à la conquête des marchés de réalisation des infrastructures. Certains acteurs qui sont déterminés à dénoncer ces pratiques sont confrontés à l’influence de certains notables. A ce jour, les manigances se font au vu et au su de tout le monde a lancé un acteur.
Perspectives
Aux dernières nouvelles, des discussions seraient engagées avec l’UNICEF qui, probablement se véra confiée la gestion des fonds issus des redevances versées aux collectivités de Dinguiraye et Siguirini. Cette mesure semble être mal appréciée et risque d’être combattue par des groupes dont les intérêts sont menacés par cette perspective. Les contacts se multiplient et la société civile dit ne pas avoir assez d’informations sur ce qui se trame. Elle entend tout de même lancer des actions visant à redresser la barre, au nombre desquelles:
- Le renouvellement du bureau du conseil préfectoral de société civile jugé caduque et inopérant,
- Engager un plaidoyer au niveau local et national en vue de la mise en place du conseil préfectoral de développement(CPD). Ceci, en collaboration le député uninominal de Dinguiraye, Honorable Fodé Maréga qui fait de cette action son combat,
- La planification d’une série d’actions de renforcement des capacités des OSC sur le mécanisme de suivi des obligations contractuelles des entreprises.
Avec la nouvelle donne, caractérisée par l’arrivée d’un nouveau préfet, la suspension du directeur préfectoral des mines, jadis acteur majeur dans la mobilisation et la gestion des fonds (trouble-fête pour la tendance qui soutient le préfet), la situation reste une fois encore confuse. Minée par des querelles d’intérêts entre cadres de la préfecture, élus locaux et certains membres de la société civile, Dinguiraye risque d’être la grande victime des manœuvres pour le contrôle de la manne financière destinée au développement communautaire. Elle est en passe d’être sucée par des cadres qui se cachent derrière des entreprises constituées pour le besoin de la cause.
En manque d’une société civile forte et unie, tout porte à croire que les différentes manœuvres engagées auront raison sur le droit et le bon sens.